Arushaniouz

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Ouaga côté maraîchers

Hier, pour la deuxième fois en ce mois de janvier, je suis partie en vadrouille avec Harouna, faire la tournée des producteurs de légumes. Harouna vend des semences potagères sur Ouagadougou, où il a sa petite boutique en centre-ville. Il a également des activités sur Bobo Dioulasso et en Côte d’Ivoire.

 

Les maraîchers sont situés principalement le long des barrages, au nord de Ouagadougou. Normal, c’est là qu’il y a de l’eau. Harouna a mis quelques essais en place chez certains producteurs avec des variétés Rijk Zwaan, et nous sommes allés voir comment tout cela se comportait. Pour faire bref, la germination est tout à fait concluante, mais le manque d’arrosage et le soleil ont souvent raison des petits plants. Ils utilisent beaucoup de pesticides et d’engrais chimiques, dont des produits pas du tout destinés aux cultures maraîchères, comme le Conquest (pesticide du cotonnier ) ou même le DDT. Cela pose un vrai problème de santé publique, mais ça, c’est une autre histoire.

 

Ce qui est amusant, c’est de rencontrer les cultivateurs. Ils sont contents de montrer leurs cultures, et d’échanger avec nous. Beaucoup, même s’ils maîtrisent le français, préfèrent parler en mooré, et Harouna fait les traductions. En arrivant, on prend son temps pour demander comment va la santé, la famille, les enfants… Le mot que j’ai retenu, c’est Laafi, qui veut dire à peu près « bonne santé », et qu’on utilise en guise de bonjour. On peut l’utiliser en tant que « comment va la santé » et « portez-vous bien ». Une marque d’eau minérale locale s’appelle Lafi d’ailleurs. Ensuite on parle cultures, affaires, on échange et on palabre. Généralement avec beaucoup de bonne humeur, et en prenant tout son temps. Puis on remercie chaleureusement en partant, en répétant Barka (merci).

 

Harouna me répète souvent qu’en allant voir les cultivateurs, on va à la rencontre du Burkina profond. C’est vrai que ces cultivateurs sont très pauvres pour la plupart, et ont du mal à s’en sortir. Mais ils savent aussi, comme beaucoup de leurs compatriotes, très bien jouer sur la corde sensible, et un blanc pour eux a forcément les moyens et peut donner. Ils me font souvent part de leurs difficultés, de leurs familles nombreuses, du mari à la retraite ou encore de l’épouse malade. Me racontent que c’est dur, de trouver l’argent pour les médicaments, qu’ils n’ont plus d’essence pour la moto, que c’est dur, de travailler dans les champs pour gagner quelques sous. Mais oui, je veux bien, mais c’est qu’ils sont nombreux, les Burkinabés !

 

Un des cultivateurs que nous avons rencontrés hier a une assez belle exploitation où travaillent entre autres de nombreuses femmes. C’est le seul que j’ai vu jusqu’à là avec une pompe thermique pour puiser l’eau d’arrosage, reliée à de gros tuyaux munis de têtes d’arrosoirs (les autres puisent l’eau avec des sceaux dans des trous creusés un peu partout). Il m’a parlé du FAO, et de tout ce que cet organisme fournit gracieusement aux cultivateurs pour les aider : les tuyaux, la pompe… et les semences. Et m’a demandé de faire la même chose, car sinon il ne peut pas gagner sa vie. J’ai ri, et lui ai expliqué que si nous lui donnons tout, nous non plus, nous ne pouvons pas gagner notre vie. Il a ri aussi, et dit que nous devrions pouvoir « échanger pour trouver un accord qui le satisferait ».

 

J’ai aussi assisté à une petite joute verbale entre Harouna et quelques cultivatrices. Apparemment c’était très drôle, et Harouna m’a expliqué en gros de quoi il s’agissait : il y a beaucoup d’ethnies au Burkina, Harouna est quant à lui Mossi, et les femmes présentes issues d’autres ethnies. Il existe une sorte de système de caste entre les peuples qui n’a peut-être plus trop lieu d’être aujourd’hui, mais qui est ancestral, et bien ancré dans les esprits. Harouna a appelé ces femmes ses esclaves, sur quoi elles l’ont rebiffé à grands éclats de rire, suivi d’autres taquineries du même genre bien accueillies de tous.

 

Bref, j’ai passé une excellente matinée, riche en découvertes et sensations. Une approche différente et intéressante pour aller à la rencontre du pays et de ses habitants.

 



25/01/2013
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